GUERRE RUSSIE -UKRAINE : HYPOTHESES DE FIN ET LECONS APPRISES

 

L’on parle bien, si souvent et si intensément, ce dernier temps, du conflit Russo-Ukrainien. La soif de vengeance des politiques occidentales contre la Russie et leur stratégie pour mettre la Russie à genoux a révélé des réalités qui inaugurent des leçons inédites en relations internationales. Il devient alors hautement intéressant de regarder quelques points essentiels : (i) Le parallèle entre le conflit russo-ukrainien et d’autres conflits banalisés dans le monde, (ii) les axes de dépendance, (iii) l’incroyable perte de lucidité des pays d’Europe et (iv) l’Inconnu des perspectives des axes de puissance pour demain.

I.                   Le Conflit Russo – Ukrainien et ses parallèles :

Ce conflit a pour base la volonté occidentale de faire basculer l’Ukraine du bloc Est au Bloc West. On a entendu le Président Ukrainien dire plusieurs fois aux occidentaux « L’Ukraine se bat pour vous ». Si la phase actuelle du conflit date de février 2022, le conflit a, lui, commencé en 2014. A l’époque les accords de Minsk donnent un espoir de paix sous la médiation stérile des européens. Deux thèses se confrontent dans ce conflit : d’une part le rappel russe de l’existence d’un peuple russo-ukrainien héritage de la Rus’ de Kiev, avec Vladimir le Grand depuis l’an 988 et d’autres part la thèse occidentale de la souveraineté étatique de l’Ukraine.

Russes et Occidentaux pouvaient bien se mettre d’accord sur la neutralité de l’Ukraine, s’ils voulaient tous la paix. Vous ne pensez pas ? Et les intérêts de chaque camp seraient préservés.

Quoiqu’il en soit le déclenchement des hostilités entre la Russie et l’Ukraine, en février 2022, a ramené la crise à une nouvelle phase dans laquelle l’occident est uni pour soutenir Kiev au nom du respect du droit international et de la nécessité de préserver les frontières et lutter contre l’agression d’un pays souverain par un autre.

Seulement, la position occidentale devient un péché lorsque l’on considère la cartographie des conflits d’agression dans le monde et le parallèle des réactions du Conseil de sécurité pour défendre le principe d’intangibilité des frontières : l’occupation Est de la RDC par l’armée rwandaise, par exemple. Pour l’Ukraine l’occident, dans sa globalité ,a offert à l’Ukraine une aide plus de 56 milliards de dollars pour lui permettre de lutter contre la Russie. Pour la RDC, les Nations Unies se disent impuissante et appellent à s’entendre. Dois-je parler du conflit Israélo-palestinien ? Vous me dites, non, n’est-ce pas ? mais la chose est plus claire….

Une position qui est caractérisée d’hypocrisie internationale et qui fausse la thèse occidentale de la défense des valeurs de la charte des Nations unies et du droit international. L’ampleur de la position de l’Occident dans le conflit Russo-Ukrainien a révélé l’immoralité occidentale dans la manipulation des influences et de sa stratégie internationale. Deux poids, deux mesures.

II.                  Les axes de dépendance au regard du conflit russo-ukrainien

En fait, les relations internationales sont avant tout des relations d’influence pour défendre et promouvoir l’intérêt national. La création des Nations unies en 1945 a consacré le principe d’égalité entre les Etats souverains et membres des Nations Unies.

Cependant, le conflit russo-ukrainien vient révéler la balafre dans le visage classique des relations de dépendance entre les Etats. Malgré leur indépendance, les Etats, anciennes colonies ont été considérés pendant des décennies comme des Etats à voix satellites dont la politique internationale devaient s’aligner sur celle des anciens colons.

On aura ainsi entendu de la part de certaines personnalités politiques occidentales des phrases du genre : « depuis quand les pays africains sont-ils libres de décider ceux qu’ils veulent » ou encore « une Loi américaine pour sanctionner les pays africains allant en commerce avec la Russie ».

A réfléchir sur la défense des intérêts dans le conflit Ukrainien, le grand perdant est l’Europe. Celle-ci semble agir sur l’alignement des décisions américaines : axe de dépendance 1. L’Europe comptait sur ses appuis traditionnels, l’Afrique : Axe de dépendance 2. Celle-ci semble se rendre compte que l’Europe n’est pas une garantie de progrès pour elle. Avec l’arrivée de l’influence Chinoise et Indienne. Axe de dépendance 3. Mais en même temps, le conflit a révélé la désagrégation de l’influence occidentale sur les autres axes, notamment l’axe Europe-Moyen-Orient avec l’Iran (qui a pris des sanctions hier contre des personnalités de l’UE), l’Arabie Saoudite a gardé sa neutralité même face aux USA ; l’axe Europe-Asie (largement sur une ligne d’autonomie face au dictat occidental ; la Chine et l’Inde ont gardé un écart neutre sur le conflit et les BRICS semblent monter en puissance.

Les équilibres multipolaires sont assez visibles : l’on peut vivre et survivre comme Etat sans commercer avec les pays occidentaux et même en rupture avec eux. Cela se conforte pour l’Iran, comme pour la Russie. En usant des armes classiques qui étaient efficaces dans le circuit de dépendance coloniale et unilatérale, l’Occident découvre aujourd’hui l’inefficacité de ses armes de politique internationale et de la gestion de la guerre par la paix des grands.

III.                Quand l’Europe perd sa lucidité et la maitrise de la gestion de ses intérêts

Il faut se rendre compte que le discours des hommes politiques occidentaux, en place actuellement, est un discours de défensive, de peur, d’impuissance, de jusqu’au-boutisme. Une impression d’une classe politique poussée à bout de ses ressources et qui a du mal à accepter la possibilité de se remettre en cause dans sa position de puissance.

L’Occident (Europe, Etats-Unis) sera-t-il capable de défendre le droit international et uniquement que ce droit, aussi bien en Ukraine, en RDC, en Palestine ?

Les hommes politiques européens, par exemple, ont fait pire, ils ont visiblement trahi la défense des intérêts nationaux de leurs pays au nom de la soif de vengeance contre Poutine. On pourrait poser une simple question : quels sont les intérêts européens mis en danger par la position politiques des pays européens et quels sont les intérêts garantis ? Ces pays ont mis du temps a réalisé qu’ils prenaient publiquement des positions qui portent préjudice à leurs propres intérêts.

En même temps, la Russie, par exemple, consolide des nouveaux axes de politique internationale et motive des nouvelles dynamiques. Le cercle des pays amis de la Russie ferrait basculer à court terme les armes classiques d’influence et va accélérer la multipolarité.

Le flou intellectuel a atteint des niveaux incroyables quand on les voit condamner l’Iran de fournir des drones à la Russie, pendant que eux fournissent des armes à l’Ukraine. Ils s’alarment de la possibilité de voir la Russie acheter des armes à la Corée du Nord, alors qu’ils fournissent les armes de pointes à l’Ukraine. Ce que l’Occident aura perdu le plus, aux yeux du monde, c’est le leadership des valeurs et de la morale. La réponse à la question sur les valeurs qu’il défend ne pourra être que sélective.

IV.              Quelles perspectives pour demain ?

 

L’issue de la guerre en Ukraine n’est donc pas clair. Nous sommes face une guerre non seulement d’influence sur l’axe Occident – Russie, mais aussi sur les axes d’influence de l’Occident, autant au Sud, au Moyen-Orient qu’en Asie.

Vous pourriez comprendre la gravité des contours de cette situation. L’occident n’est pas seulement en phase de perdre la guerre contre la Russie. Elle a déjà sapé trop de ses propres intérêts dans cela. L’Europe va vers une probable récession. L’Europe préfère se punir par des sanctions qui devaient punir la Russie au lieu de plus de clairvoyance sur le réalisme qui s’impose pour des solutions de paix.

Des hypothèses sont nombreuses : (I) la solution à la guerre est négociée, l’Ukraine a un statut neutre et les intérêts des uns et des autres sont préservés, l’hypothèse la plus heureuse mais là plus détestée par les occidentaux. (Ii) la Russie est vaincue par l’Ukraine et l’Occident jubile. Cette hypothèse reste la plus porteuse d’inconnus, car l’on ne voit pas la Russie se résoudre à capituler. (iii) Guerre nucléaire avent des lendemains incertains ; (iv) Certes Il s’en suivra la guerre contre la Chine, l’Iran, l’Arabie Saoudite. Et les pays du Sud rentreront en caserne en bons et fidèles serviteurs. (v) La Russie gagne la guerre contre l’Ukraine, accord de paix, mais l’Occident aura perdu, (vi) la guerre s’enlise un peu comme pour la Crimée, (vii) Quels seront les pôles d’influence dans les 5 ans à venir ? Il reste très difficile de le savoir en ce moment précis, mais il est sûr que nous allons vers des perspectives qui feront bouger les paramètres classiques des jeux d’influence. En tout cas en comparaison avec la bipolarité Est- West ou l’uni polarité américaine.

Luc LUTALA KYAD’I,

Expert et analyste des questions électorale, politique, Relations Internationales et Développement 4D

CEO JUA Université

+243 815203199

 

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